
Les avancées en neurosciences nous ont permis de mieux comprendre le fonctionnement du cerveau humain. Si ces connaissances peuvent servir d’appui pour le diagnostic de nouveaux troubles, elles peuvent aussi être considérées comme une forme de diversité. Dans cet article, le doctorant en éducation Louis-Philippe Lachance Demers propose un tour de piste des principaux éléments théoriques en guise d’introduction à la neurodiversité. Ce concept nous invite à repenser notre point de vue sur la cognition humaine.
Qu’est-ce que la neurodiversité?
On attribue l’origine du concept de la neurodiversité à la sociologue et psychologue Judy Singer dans les années 1990. De manière générale, elle remet en question l’idée qu’il existerait un fonctionnement cognitif « normal » chez l’humain : ce serait plutôt une norme qui s’est construite petit à petit dans nos sociétés. Les connaissances de champs comme la médecine, la psychologie et les neurosciences auraient théorisé un développement « normal » chez l’enfant. Ainsi, on identifie différents diagnostics aux enfants qui dévient de cette norme.
La neurodiversité nous invite à revoir notre conception selon laquelle il existerait des cerveaux « anormaux » et à plutôt y voir une forme de diversité. Elle permet ainsi à plusieurs personnes qui ont reçu le diagnostic d’un trouble de voir leur vie sous un angle plus positif. On reconnait leur vision du monde non pas comme un problème ou un trouble, mais comme légitime. Parler de neurodiversité ne signifie pas pour autant effacer les difficultés vécues par ces personnes. Cela leur permet plutôt de proposer des explications alternatives. Bien souvent, il est possible d’expliquer ces difficultés par les normes qui dictent le fonctionnement de nos sociétés.
Une différence de point de vue?
Prenons comme exemple une caractéristique associée à plusieurs personnes autistes, soit qu’elles vivent des difficultés lors des interactions sociales.
L’explication généralement proposée est celle d’un déficit de la « théorie de l’esprit ». Cela implique que ces personnes ne seraient pas capables de s’imaginer ce à quoi pensent leurs interlocuteurs. Sous cet angle, le succès de l’interaction dépend de la personne autiste et de sa capacité à se comporter selon les normes sociales.
Sous l’angle de la neurodiversité, on propose plutôt l’explication d’un problème de « double-empathie » où chacune de ces personnes n’arriverait pas à adopter la perspective de l’autre. Dans ce cas, la responsabilité est partagée entre les deux personnes.

La principale différence entre ces deux approches est que, dans le second cas, on considère le point de vue de la personne autiste au même titre que celui de la personne non autiste. La neurodiversité nous invite donc à voir ces points de vue non pas comme « anormaux », mais comme différents de ce que nous avons appris comme étant la norme.
Il peut d’ailleurs être difficile de trouver les bons mots pour parler de neurodiversité sans faire référence à cette norme. Nous proposons donc quelques suggestions de vocabulaire pour parler de ce phénomène.
Quelques mots pour parler de neurodiversité
Il existe quelques principes fondamentaux pour parler de neurodiversité :
- Le profil cognitif de certaines personnes correspond à la norme. Pour parler de ces personnes on emploie généralement le terme « neurotypique »
- Le profil cognitif de certaines personnes est différent de la norme. Pour parler de ces personnes on emploie généralement le terme « neurodivergente »
La neurodiversité, c’est l’ensemble de ces personnes

Ces termes ont comme avantage de mettre l’accent sur la norme plutôt que sur les personnes elles-mêmes. Plus inclusifs, ils nous rappellent que certaines personnes dévient de la norme établie tandis que d’autres s’y conforment.
Cependant il est important d’éviter de les utiliser comme synonymes de « normal » et « anormal ». C’est pourquoi on évite aussi d’utiliser le terme « neuroatypique » qui est généralement vu d’un œil négatif. Finalement, on évite d’associer la neurodiversité seulement aux personnes neurodivergentes en les présentant comme « issues de la neurodiversité ».
Et comme parent?
La neurodiversité, c’est considérer qu’il y a plus d’une façon de penser et que le fait de penser différemment n’est pas nécessairement négatif. Chez les parents d’enfants neurodivergents, elle peut alimenter des discussions afin d’aider son enfant à :
- Accorder une valeur à son point de vue et à sa perspective sur le monde
- Développer une vision positive de son identité
- Se définir autrement que par son diagnostic
- Identifier les causes de ses difficultés