
Il est parfaitement normal d’oublier! Qui n’a pas déjà oublié de répondre à un courriel ou de sortir les poubelles? Cependant, on a parfois l’impression que les enfants oublient tout et que les parents passent leur temps à se répéter. Ceci peut être très frustrant, particulièrement quand on donne des instructions qui nous semblent si simples! Dans cet article, Marilou Poitras, étudiante au doctorat à l’Université d’Ottawa, vise à expliquer le développement de la mémoire chez les jeunes. Ceci aidera à comprendre pourquoi il faut se répéter aussi souvent aux enfants.
Qu’est-ce que la mémoire ?
La mémoire représente notre habileté d’apprendre des informations et de s’en souvenir plus tard. Il y a plusieurs sortes de mémoire, dont la mémoire de travail. Celle-ci représente notre capacité à maintenir et à manipuler une petite quantité d’information dans notre esprit pendant un très court moment. Par exemple, si quelqu’un nous mentionne des items à mettre sur une liste d’épicerie, notre mémoire de travail nous permet de garder ces items en tête pendant que nous cherchons un papier et un crayon pour les noter.
Typiquement, la mémoire de travail a une capacité limitée à quelques items (habituellement entre 3 et 5 chez les adultes). Donc, si quelqu’un nous nommait une douzaine d’aliments, nous ne serions probablement pas capables de tous les garder en tête pour les écrire, et certains articles seraient oubliés. Dès lors, la mémoire de travail est essentielle au bon fonctionnement dans notre quotidien.
Les enfants qui ont des défis avec leur mémoire de travail vont souvent avoir de la difficulté à l’école. Il·elle·s vont également être facilement déconcentrés ou avoir des problèmes à planifier les séquences d’une tâche à compléter, comme les devoirs.
Pourquoi les enfants ont moins bonne mémoire ?
Les recherches en neuroscience nous on permit de comprendre pourquoi les enfants ont une moins bonne mémoire. Les régions du cerveau qui contrôlent la mémoire sont en développement constant. Il est donc normal que la mémoire de travail des enfants s’améliore en grandissant. En effet, les enfants en bas âge ne peuvent pas garder autant d’éléments dans leur mémoire de travail.
Puisque la mémoire de travail agit comme la porte d’entrée pour notre mémoire à long terme, si nous avons une plus petite capacité de mémoire de travail, nous ne pouvons pas enregistrer autant d’information pour plus tard. La raison principale qu’il faut répéter plus souvent aux enfants est donc que leur cerveau, et ainsi le fonctionnement de leur mémoire, sont encore en développement !
Qu’est-ce qui affecte la mémoire chez l’enfant ?
Plusieurs facteurs peuvent influencer la rétention de l’information d’un enfant. Il y a, notamment, le stress et l’intimidation. En situation de stress, le cerveau tombe en mode « survie ». La priorité n’est donc pas sur le fonctionnement de la mémoire, mais plutôt sur notre réaction à ce stress.
De façon similaire, le manque de sommeil et la fatigue peuvent aussi augmenter l’oubli. Cela est car le cerveau manque d’énergie pour faire du rappel d’information et pour stocker correctement de nouveaux souvenirs. Pour ce qui est de la mémoire de travail, elle peut également se réduire chez les enfants ayant des troubles neurodéveloppementaux, comme le trouble du déficit de l’attention/hyperactivité (TDAH).
Des trucs pour aider à réduire l’oubli chez les enfants
- Connaissez les limites de votre enfant. Nous avons tous des limites quant à notre capacité de mémoire. Cette variabilité individuelle fait en sorte que même si un de vos enfants se rappelle facilement des instructions, ça ne veut pas dire que ce sera pareil pour tous vos enfants ! Il est important d’ajuster la quantité d’information offerte en fonction des capacités de votre enfant et de répéter au besoin.
- Séparer les tâches en de plus petits segments. La mémoire de travail des enfants est en développement. Ainsi, il·elle·s ne peuvent pas maintenir en tête autant d’information qu’un adulte. Si on donne une longue liste de tâches à un enfant en un seul coup, les chances sont qu’il·elle·s vont en oublier plusieurs. Ainsi, donner une tâche à la fois peut aider à éviter de dépasser la capacité de leur mémoire de travail. On peut par la suite augmenter le nombre de tâches avec l’amélioration de ses compétences. Au lieu de demander à l’enfant de faire son lit, ramasser ses jouets et se brosser les dents, il peut être préférable de juste dire la première tâche. Les instructions additionnelles peuvent être données une fois que celle-ci sera complétée.
- Utilisez des aide-mémoires. Les enfants surestiment leur capacité de se souvenir des informations. En effet, il·elle·s pensent pouvoir se rappeler de tout, même si ce n’est pas le cas. Pour les aider à se souvenir d’accomplir leurs tâches, il peut être utile d’utiliser des aide-mémoires, tels qu’un agenda ou une liste de tâches (« to do list »). Bien entendu, chaque enfant est différent. On peut donc travailler avec eux·elles pour trouver des stratégies qui vont les aider à mieux se rappeler. Puisque la motivation joue un rôle important dans la mémoire, si votre enfant est investi dans la stratégie, vous aurez de meilleures chances qu’elle fonctionne !
- Soyez patient. Il est parfois difficile de ne pas se frustrer à force de se répéter. Il est néanmoins important de garder en tête que l’oubli n’est pas intentionnel ! Votre enfant ne fait pas probablement pas exprès d’oublier les formules de politesse ou de ranger ses souliers. Des petits rappels comme « Qu’est-ce qu’on dit quand quelqu’un nous donne quelque chose ? » ou « C’est quoi la première chose qu’on fait en entrant dans la maison ? » peuvent encourager l’enfant à mettre en action ses capacités mnésiques, sans ajouter un stress d’avoir frustré ou déçu son parent. Ceci permettra de débuter des processus d’automatisation afin que cela devienne une habitude.
À propos de l’autrice

Marilou Poitras est étudiante au doctorat en psychologie expérimentale à l’Université d’Ottawa. Ses recherches portent sur les effets du stress sur le fonctionnement du cerveau. Elle s’intéresse aussi aux impacts cognitifs et émotionnels des maladies cardiovasculaires.