
L’impuissance apprise est un sentiment développé chez un enfant par rapport à sa capacité à réaliser une tâche. Elle peut ainsi influencer le comportement des enfants. Il est pertinent de s’y intéresser, car l’impuissance apprise peut s’avérer une piste de réflexion stimulante sur laquelle intervenir afin de soutenir la réussite éducative et le bien-être des enfants. En effet, l’impuissance apprise représente une lunette intéressante pour mieux comprendre les comportements de nos enfants.Cet article, rédigé par Audrey Lachance, étudiante au doctorat en éducation à l’UQTR, décrit l’impuissance apprise et offre des trucs aux parents pour accompagner leurs enfants vers la réussite.
L’impui-quoi ? Une brève description
L’impuissance apprise est un sentiment qui influence les croyances d’un enfant et son attitude à l’égard de la tâche à accomplir. On y réfère aussi en tant que résignation apprise.
Un enfant présentant des signes d’impuissance apprise pense qu’il·elle ne peut réussir, et ce peu importe ses efforts. L’enfant croit qu’il·elle n’a pas de contrôle sur ce qui lui arrive. Parmi les signes de l’impuissance apprise, on retrouve entre autres le découragement, le manque de motivation et un faible engagement à l’égard de la tâche à réaliser.
Il y a trois dimensions importantes à l’impuissance apprise : le sentiment de contrôle, la cognition et le comportement.
Le sentiment de contrôle
L’impuissance apprise concerne la relation entre les actions d’un enfant et ce qu’il·elle vit (les répercussions vécues). On peut penser aux aspects contrôlable/incontrôlable et prévisible/imprévisible des expériences vécues par l’enfant. Par exemple, si un enfant sent qu’il·elle ne peut contrôler ou prévoir ce qu’il·elle lui arrivera, l’enfant se sentira impuissant.
La cognition
La cognition réfère à la façon dont l’information est traitée par le cerveau, aux apprentissages réalisés et à la capacité de l’enfant à retenir de l’information. C’est la perception de l’aspect inévitable et imprévisible de la situation qui produit le sentiment d’impuissance et non la situation comme telle. Par exemple, un enfant échouant souvent à des évaluations peut développer une forme d’impuissance apprise. Cela dit, ce ne sont pas ses échecs qui mèneront au développement de ce phénomène, mais bien le fait que l’enfant pense qu’il·elle va échouer peu importe ce qu’il·elle fait. Selon les principes de l’impuissance apprise, l’enfant apprend qu’il n’existe pas de liens entre ses actions et le résultat de la tâche. Autrement dit, il·elle intériorise que ses efforts n’ont pas d’importance et retient qu’il·elle va nécessairement échouer.
Les comportements
La dernière dimension réfère au manque de motivation de l’enfant et aux difficultés à exprimer ses émotions lorsqu’il·elle vit des évènements désagréables. En ce sens, l’enfant échouant à ses évaluations de façons répétitives utilisera moins ses stratégies qui l’aident habituellement à réussir. Il·elle sera anxieux·anxieuse lors de ses évaluations. Ce manque de motivation et ces difficultés ne permettent pas à l’enfant d’atteindre tout son potentiel et de réussir.
Une analogie pour mieux comprendre l’impuissance apprise
Voici une analogie pour mieux comprendre ce qu’est l’impuissance apprise : imaginez que vous jouez à un jeu vidéo, mais que vous n’arrivez pas à gagner, peu importe ce que vous essayez. Il est fort possible que vous commenciez à penser que vous n’y arriverez jamais et que cela est inévitable. Vous allez probablement vous décourager et vous sentir démotivés. Vous allez peut-être même développer des émotions négatives et des comportements impulsifs. Il est même possible que vous croyiez que vous ne pourriez gagner dans aucun jeu vidéo. Cette réalité peut sembler fataliste, mais elle est représentative de ce qu’un enfant ressent lorsqu’il·elle développe de l’impuissance apprise.
Qu’est-ce qui peut mener au développement de l’impuissance apprise chez mon enfant ?
Un enfant peut développer de l’impuissance apprise à la suite d’un ou de plusieurs évènements désagréables. D’ailleurs, lorsque l’enfant est fréquemment confronté à des échecs scolaires, l’école devient un environnement favorisant l’impuissance apprise. On peut observer l’impuissance apprise chez plusieurs enfants. Cependant, elle semble moins présente chez les enfants qui n’ont pas de difficultés d’apprentissage. De plus, lorsque ces élèves développent l’impuissance apprise, il·elle·s sont moins affectés par certaines dimensions du phénomène. Par exemple, ces enfants seront moins démotivés face à la tâche à réaliser.
En ce sens, l’impuissance apprise est un facteur de risque supplémentaire pour les élèves qui vivent des difficultés d’apprentissage. Contrairement à un facteur de protection, un facteur de risque peut nuire à l’émancipation et à la réussite des élèves.
Les impacts de l’impuissance apprise sur le bien-être des enfants
Le sentiment d’impuissance influence la motivation de l’enfant et son état de stress. Ce sentiment influence également sa capacité à agir, à réagir et à s’adapter. L’impuissance apprise peut mener à des problèmes intériorisés (anxiété, dépression et isolement) et à des problèmes extériorisés (opposition, tendance à être agressif ou impulsif). De plus, un enfant ayant développé l’impuissance apprise a plus de chances d’avoir des performances scolaires plus faibles et une estime de soi plus faible.
Tous les enfants sont capables de réussir et de s’épanouir. Néanmoins, les enfants qui vivent souvent des difficultés, notamment à l’école, peuvent développer de la frustration et un sentiment d’échec, ce qui peut mener à l’impuissance apprise. Il est possible d’apporter des changements dans l’environnement familial et scolaire afin de diminuer le risque de développer l’impuissance apprise. Ainsi, ces interventions peuvent contribuer à placer les enfants dans un contexte qui favorise leur participation et leur réussite.
Quel est mon rôle comme parent ?
Comme parent, il est important d’être à l’écoute des émotions de son enfant. On veut porter attention aux façons dont l’enfant exprime ses émotions et les répercussions de celles-ci sur son comportement. De plus, favoriser une communication positive par rapport à l’école peut diminuer le risque de développer de l’impuissance apprise.
Aussi, il importe de valoriser l’erreur et de favoriser le développement de l’autonomie. On veut ainsi amener son enfant à comprendre qu’il·elle a un contrôle sur qu’il·elle vit. En effet, lorsque les enfants sont plus en contrôle, leur sentiment d’efficacité personnelle est plus fort. Les enfants perçoivent les difficultés vécues comme des défis à relever. Il·elle·s sont ainsi plus persistant·e·s dans leurs tâches même lorsqu’elles sont difficiles.
De plus, afin d’encourager la persévérance, on veut tenter de conscientiser les enfants à l’importance de leurs efforts. Pour ce faire, il·elle·s doivent se sentir soutenus lors de leurs échecs. Les enfants doivent aussi considérer leurs échecs comme des occasions de s’améliorer et d’apprendre.
Des astuces pour réduire l’impuissance apprise chez mon enfant
- Demander à son enfant comment il·elle se sent ;
- Observer des manifestations de colère ou de tristesse et valider auprès de son enfant ce qu’on a observé ;
- Demander à son enfant ce qu’il·elle a vécu pendant sa journée ;
- Souligner les forces et les réussites de son enfant ;
- Amener son enfant à faire des choix (p. ex. choisir ses vêtements, choisir ce qu’il·elle mangera le midi) ;
- Permettre à son enfant de prendre part aux décisions (p. ex. décider une activité à faire pendant la fin de semaine) ;
- Ne pas corriger immédiatement une erreur réalisée par l’enfant, l’amener à réfléchir sur ce qui l’a mené à faire cette erreur ;
- Cibler les éléments qui peuvent influencer l’apparition de comportements dérangeants et discuter avec l’enfant pour trouver des moyens pour les prévenir ;
- Faire des retours quotidiens avec son enfant.
Vous pouvez aussi consulter cette infographie pour avoir un survol visuel de cet article.
À propos de l’autrice

Audrey Lachance est étudiante au doctorat en éducation et chargée de cours au Département des sciences de l’éducation à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). Elle est membre étudiante du Laboratoire international sur l’inclusion scolaire (LISIS) et du Réseau de recherche et de valorisation de la recherche sur le bien-être et la réussite en contexte de diversité (RÉVERBÈRE). Ses intérêts de recherche portent sur l’éducation inclusive, les pratiques évaluatives cohérentes avec une telle vision de l’éducation et la réussite éducative.