Les relations fraternelles et leur influence sur le développement de l’enfant

Selon le recensement de 2021, plus de 40% des familles canadiennes sont des familles avec enfants et 5% sont des familles recomposées (Statistique Canada, 2021). Alors que plusieurs études documentent l’importance de la relation parent-enfant pour le développement de l’enfant, un nombre croissant d’études montre que la fratrie joue aussi un rôle important. Cet article, rédigé par Dre Jessica Turgeon, chercheuse postdoctorale à l’Université de Calgary, décrit la nature des relations fraternelles et leur influence sur le fonctionnement adaptatif des enfants.

La nature des relations fraternelles

Les relations qui se développent entre les membres d’une fratrie sont habituellement très intimes. Elles sont également susceptibles de durer plus longtemps que toute autre relation. Ces relations offrent un éventail d’expériences se caractérisant par des émotions fortes, autant de nature positive que négative. Les interactions positives peuvent se traduire par la présence de soutien, d’affection, de camaraderie, d’empathie ou d’enseignement. Les interactions négatives, quant à elles, se marquent par la présence de conflits, de rivalité, d’agressivité ou d’évitement.

Bien qu’elles soient parfois conflictuelles, ces dynamiques fraternelles offrent un contexte propice au développement des habiletés de résolution de conflits. Elles offrent également un contexte propice pour la gestion des émotions et de l’empathie / la compréhension des émotions d’autrui.

L’influence des relations fraternelles sur le développement de l’enfant

Les recherches antérieures révèlent que la qualité des relations fraternelles exerce une influence sur le développement socio-affectif des enfants. Plus spécifiquement, les résultats d’une méta-analyse indiquent que les enfants qui ont des relations fraternelles plus chaleureuses et moins conflictuelles présentent de plus faibles problèmes de comportement intériorisés (p. ex., anxiété, dépression) et extériorisés (p. ex., agressivité). D’autres études montrent des associations positives entre le niveau d’affection entre frères et sœurs et les comportements prosociaux à l’adolescence, ainsi que les capacités d’autorégulation.

En contrepartie, les relations fraternelles conflictuelles sont associées à une moins bonne estime de soi, de moins bonnes compétences sociales et des niveaux plus élevés de dépression et de problèmes de comportement à l’adolescence.

La qualité des relations fraternelles comme facteur de protection

Les relations au sein d’une fratrie peuvent aussi constituer une source importante de soutien lors de moments de stress. Par exemple, une dynamique fraternelle de bonne qualité joue un rôle protecteur auprès des enfants exposés à des conflits conjugaux, dont le parent a vécu des événements de vie stressants et dont le parent présente un trouble psychopathologique.

Plus récemment, une étude canadienne a montré que les interactions positives entre frères et sœurs, et plus particulièrement l’empathie, jouent un rôle protecteur auprès des enfants d’âge scolaire dont le père vit de la détresse psychologique. Ces résultats encourageants suggèrent que les relations qui se développent entre les membres d’une fratrie peuvent protéger l’enfant en contexte de stress. Elles constituent également une source de confort et de sécurité lorsque le parent est moins disponible.

Stratégies à adopter pour les parents et les intervenants

Au quotidien, il n’est pas rare que les interactions entre frères et sœurs oscillent entre la complicité et la rivalité. Ces conflits peuvent être source de stress chez les parents et entraîner un fort sentiment d’impuissance chez ces derniers. Dans ce contexte, on recommande aux parents d’agir comme médiateurs. Plus spécifiquement, le rôle des parents consiste à outiller et accompagner l’enfant dans la résolution de conflits plutôt que d’imposer une solution. Ces recommandations s’appliquent aussi aux programmes d’intervention. Selon Kramer, les interventions familiales devraient viser à accroître les comportements prosociaux des enfants plutôt que de chercher à éliminer les conflits.

À propos de l'autrice
À propos de l’autrice

Dre Jessica Turgeon est une chercheuse postdoctorale à l’Université de Calgary. Elle détient un doctorat en psychologie de l’Université du Québec à Trois-Rivières et se spécialise dans le domaine de l’attachement parent-enfant et du développement de l’enfant. Ses recherches visent à mieux comprendre les conséquences associées aux traumatismes relationnels vécus en bas âge et à identifier des facteurs de protection dans le développement des jeunes exposés à l’adversité.

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