Comment parler de la mort aux enfants?

En tant que parent, il peut être difficile de parler de la mort avec son enfant.
En tant que parent, il peut être difficile de parler de la mort avec son enfant.

Dans plusieurs cultures, la mort est un sujet tabou qui est évité, particulièrement dans les discussions avec les enfants. La recherche suggère toutefois qu’il serait préférable de parler ouvertement de la mort avec les enfants. Dans cet article, Dre Sabrina Schmiedel explique comment en parler et répondre aux questions difficiles que les enfants ont souvent au sujet de la mort. 

La mort, un sujet difficile, mais important à aborder

Les adultes ont parfois tendance à vouloir protéger les enfants. Ainsi, plusieurs évitent de parler de la mort devant et avec ceux-ci. La mort est toutefois une étape naturelle et inévitable du cycle de la vie. Tout le monde est y éventuellement confronté.

Toutefois, éviter de parler de la mort à son enfant peut avoir des conséquences négatives. Par exemple, les enfants pourraient ne pas oser eux-mêmes parler de la mort, se sentir isolés ou ressentir de la honte ou de la culpabilité. Les enfants peuvent alors être forcés à faire face à leur deuil par eux-mêmes. Il est donc recommandé de parler de la mort ouvertement. De cette façon, on peut aider les enfants à comprendre la mort et le deuil pour mieux y faire face. 

Compréhension de la mort selon l’âge 

Les enfants de 0 à 3 ans ne comprennent pas encore le concept de mort. Néanmoins, ils perçoivent les émotions des personnes autour d’eux. Ils peuvent également ressentir l’absence d’une personne qui faisait partie de leur quotidien.

Les enfants de 3 à 5 ans voient la mort comme si la personne était partie à un autre endroit. Ils ont tendance à penser que c’est temporaire et que la personne peut revenir.

Les enfants de 5 à 9 ans commencent à avoir une idée plus abstraite de la mort. Ils peuvent s’imaginer la mort comme étant une personne, un endroit ou une chose (p.ex., un squelette, le paradis/l’enfer, un lit d’hôpital). Ils ont toutefois encore de la difficulté à comprendre qu’eux-mêmes ou un de leur proche pourrait mourir.

Les enfants de 9 à 12 ans en viennent graduellement à avoir une compréhension plus complète de la mort comme étant permanente, irréversible, inévitable et universelle. Ils comprennent que la mort affecte tous les êtres vivants.

Conseils généraux pour parler de la mort avec un enfant

  • Initier des discussions au sujet de la maladie et de la mort de façon régulière et ouverte. Bien que les enfants parlent plus souvent de la mort avec leurs parents, tous les adultes impliqués auprès de l’enfant peuvent faciliter de telles discussions.
  • S’adapter à l’âge et au niveau développemental de l’enfant.
  • Dire les vraies choses de façon claire, directe et honnête.
  • Demander à l’enfant ce qu’il a compris (clarifier au besoin) et offrir de répondre à ses questions à différents moments.
  • Si l’enfant pose une question, reconnaître l’importance de sa question et tenter d’y répondre de façon claire et spécifique. Considérant le côté inconnu de la mort, on peut avouer qu’on ne connaît pas la réponse. On peut toutefois expliquer pourquoi il est difficile d’avoir une réponse exacte et explorer avec l’enfant différentes croyances relatives à sa question.
  • Les parents peuvent transmettre leurs croyances personnelles, culturelles et traditions spirituelles relatives à ce qui se passe après la mort.
  • On peut réfléchir ensemble à propos des questions de la vie auxquelles nous n’avons pas de réponses exactes.

Annoncer la mort d’une personne à un enfant

Suite à un décès, il est important qu’un proche annonce la mort dès que possible à l’enfant. Durant cette conversation, on veut essayer d’éviter les euphémismes (p.ex., il est parti, nous avons perdu grand-maman, il nous a quitté, elle s’est endormie pour toujours). En effet, ces euphémismes peuvent entrainer davantage de confusion et de mécompréhension chez l’enfant.

Puisque les enfants peuvent se blâmer pour la mort de la personne, il est important de leur dire que ce n’est pas leur faute et de leur expliquer ce qui a causé la mort de façon adaptée à leur âge. Il est aussi pertinent d’inviter l’enfant à poser ses questions et de le faire sentir en confiance pour parler de la mort. Par exemple,

  1. Expliquer la mort : « Tante Annie est devenue malade. Elle a eu une grosse maladie qu’on appelle un cancer dans son ventre. Le cancer est devenu trop fort et le médecin ne pouvait pas la guérir. Son corps a arrêté de fonctionner et elle est morte. »
  2. Rassurer l’enfant : « Ce n’est pas de ta faute, ni de la faute de Tante Annie. Le docteur ne pense pas que ça va arriver à d’autres personne dans notre famille. »
  3. Donner du temps à l’enfant, et accueillir sa réaction et valider ses émotions : « Je comprends que tu es triste. Moi aussi ça me fait beaucoup de peine. On aimait beaucoup Tante Annie et elle va nous manquer. »
  4. Ouvrir la discussion : « Est-ce que tu as des questions? Je sais que c’est un moment difficile. Tu peux toujours venir me parler quand tu as besoin ». 

Après l’annonce, il est important de reconnaître que chaque deuil est vécu différemment. Les éléments suivants devraient toutefois être considérés :

  • Expliquer à l’enfant que leur expérience et leurs émotions sont normales. Le deuil est un processus qui prend du temps et il n’y a pas de bonne ni de mauvaise façon de l’exprimer.
  • Essayer de préparer l’enfant d’avance et de lui expliquer ce qui va se passer (p.ex., annoncer et expliquer si une personne est en fin de vie, expliquer en détail comment vont se dérouler les funérailles, etc.).
  • Lorsque possible, encourager l’enfant à participer dans les soins de fin de vie ou dans les rituels/préparatifs post-mortem de façon appropriée pour leur âge (p.ex., donner 1-2 tâches simples qu’ils peuvent accomplir).
  • Ne pas forcer un enfant qui a peur ou qui refuse de participer aux funérailles ou à un rituel post-mortem. Un tel rituel peut être positif pour le processus de deuil, mais un autre plan ou rituel peut être décidé de façon collaborative avec l’enfant pour honorer la vie de la personne décédée.
  • Montrer et parler de vos propres émotions et expliquer vos réactions de deuil à l’enfant de façon à normaliser ce type de conversation (sans qu’il ait besoin de prendre soin de vous, ni qu’il soit submergé par vos émotions).

Pour en lire plus sur les meilleures façons d’appuyer un enfant en deuil, nous vous invitons à lire cet article rédigé à ce sujet.

Répondre aux questions difficiles sur la mort 

Exemple de questionÀ considérer pour la réponseExemple de réponse
Pourquoi est-ce que les gens meurent?La réponse devrait être simple et aborder la réalité physique de la mort. Les débats philosophiques devraient être évités (sauf peut-être avec les adolescents).

La réponse peut également intégrer vos croyances personnelles.
« Les gens meurent parce qu’ils sont trop malades, trop blessés ou trop vieux. Les médecins ou la famille peuvent parfois aider, mais quand c’est trop, leur corps arrête de fonctionner et ils meurent. Ça fait partie du cycle de la vie.»
Est-ce que tu vas mourir?Dans cette question, il est souvent sous-entendu « si tu meurs, qu’est ce qui va m’arriver à moi? ».« Je suis en bonne santé et je vais faire tout ce que je peux pour rester en vie et prendre soin de toi le plus longtemps possible. Si jamais il m’arrivait quelque chose, ta tante Julie et ton oncle Rob vont prendre soin toi. Ils t’aiment beaucoup. »
Où est cette personne maintenant?
Qu’est-ce qui arrive après la mort?
Vous pouvez reconnaître qu’il n’y a pas de réponse absolue à cette question. Il est pertinent de partager vos croyances personnelles / les croyances spirituelles ou religieuses de votre communauté.« Je ne suis pas certaine, parce que les gens qui sont morts ne peuvent pas nous dire où ils vont, mais j’aime penser qu’ils vont au paradis. »

« Certaines personnes croient qu’ils vont dans un autre monde, d’autres pensent qu’ils reviennent sur la terre pour vivre une autre vie. »
Pourquoi elle/lui?
Pourquoi ça m’arrive à moi?
Ce type de question peut sous-tendre des sentiments de culpabilité ou d’injustice. Si vous sentez que c’est le cas, vous pouvez explorer, nommer et valider ces émotions.« Je te comprends, moi aussi je me sens comme si ce n’est pas juste. On ne sait pas pourquoi c’est arrivé, c’était un accident. L’important c’est de savoir que ce n’est pas de ta faute. C’est correct d’être fâché et d’être triste. »
À propos de l'autrice
À propos de l’autrice

Dre Sabrina Schmiedel détient un doctorat en psychologie clinique de l’Université d’Ottawa. Dans le cadre de sa thèse de doctorat, elle s’est intéressée au rire des enfants dans le cadre de la relation mère-enfant et père-enfant. Dre Schmiedel fait partie de l’équipe de psychologie du Conseil des Écoles Publiques de l’Est de l’Ontario (CEPEO) et travaille comme thérapeute au Centre des Enfants, des Adolescents, et de la Famille d’Ottawa (CEAFO). Elle est en processus d’accréditation pour devenir psychologue clinicienne.

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