Tourbillons d’émotions à l’adolescence : Enjeux et stratégies de gestion des émotions

Les adolescent·e·s vivent des émotions intenses à l'adolescence, et doivent apprendre à les gérer!
Les adolescent·e·s vivent des émotions intenses à l’adolescence, et doivent apprendre à les gérer!

Votre adolescent·e semble vivre des émotions intenses et fluctuantes sans vraiment comprendre comment les exprimer ? C’est normal ! Ça fait partie des nombreux apprentissages que nous ferons durant notre vie. Il peut être difficile, en tant que parent, de voir son adolescent·e traverser une vague d’émotions et de se sentir confus quant à la meilleure façon de l’aider. Sarah Kheloui, étudiante au doctorat à l’Université d’Ottawa, décortique ici le phénomène de gestion des émotions à l’adolescence et comment aider les jeunes à mieux y parvenir.

L’adolescence est une période durant laquelle de nombreux changements se produisent au niveau physiologique, cognitif, psychologique et social. Un de ces changements importants est le développement de la gestion des émotions.  

Qu’est-ce que la gestion des émotions ?

La gestion des émotions, qu’on peut aussi communément appeler la régulation émotionnelle, inclut plusieurs aspects, dont :

  • L’habileté d’identifier des états émotionnels internes
  • L’utilisation de stratégies facilitant l’expérience émotionnelle et
  • L’expression de ses émotions d’une façon adaptée à l’environnement.

La capacité de gérer ses émotions est acquise au travers du développement. Elle est influencée par le développement des structures cérébrales et des habiletés cognitives. Plus précisément, le cortex préfrontal, une région du cerveau associée aux habiletés cognitives complexes, se développe durant l’adolescence et termine son processus du développement lors de la vingtaine.

La gestion des émotions à l’adolescence

L’adolescence est une période importante pour la gestion des émotions. Lors de cette période, les adolescent·e·s vivent des fluctuations émotionnelles plus intenses. En vieillissant, il·elle·s développent cependant une maturité et une compréhension plus approfondie des émotions complexes qui leur permet de mieux gérer leurs émotions.

Le développement de la gestion des émotions est centrale pour le développement de relations sociales saines et le maintien d’une santé mentale stable. En effet, la difficulté à réguler ses émotions chez les adolescent·e·s est associée à des problèmes dans différentes sphères de vie. Par exemple, les adolescent·e·s qui ne gèrent pas bien leurs émotions ont plus de chance d’adopter des comportements à risque (p. ex. automutilation, comportements sexuels à risque, usage de drogues ou d’alcool) pour réduire l’état interne de détresse émotionnelle. Il·elle·s peuvent aussi obtenir de moins bons résultats scolaires.

Le rôle des parents dans la gestion des émotions à l’adolescences

Au-delà des facteurs physiologiques internes, les facteurs environnementaux sont très importants dans le développement de la régulation émotionnelle chez les adolescent·e·s. Les parents sont un facteur d’influence majeur sur le développement et l’utilisation de stratégies de régulation émotionnelle chez les adolescents. Cette influence se fait par trois processus principaux :

  1. L’observation de la gestion des émotions du parent : Les adolescent·e·s observent continuellement leurs parents. Par l’observation, un apprentissage important se fait par rapport à quelles émotions sont vécues dans quel contexte et de quelle façon elles sont exprimées. Les comportements et les habiletés de gestion émotionnelle sont donc souvent imités, reproduits et utilisés comme référence pour les adolescent·e·s.
  2. La façon dont le parent aborde les émotions de son adolescent·e : Une réaction adaptée de la part parent face aux différentes émotions de l’adolescent·e est essentielle. Par exemple, un parent qui ne permet pas à son enfant de ressentir de la tristesse peut induire d’autres émotions négatives (p. ex., la peur d’exprimer ses émotions, de la colère envers soi-même, de ressentir de la tristesse). Ce faisant, cela peut mener à une gestion inadaptée des émotions et une détresse plus grande. Une autre façon de favoriser le développement de la gestion des émotions est l’utilisation du « coaching émotionnel». Selon cette approche, le parent peut aider l’adolescent·e à identifier ses émotions, les valider, les exprimer de façon adaptée et enfin l’aider à trouver des solutions.
  3. Le contexte familial : L’environnement familial joue un rôle important. Différents aspects du climat familial incluent le style d’attachement envers le parent, le style d’éducation parental ainsi que la qualité et/ou proximité des relations avec les membres de la famille. Ainsi, les familles dans lesquelles il existe du support, un attachement sécurisant et de la cohésion permettent le développement d’une meilleure gestion des émotions.

Stratégies pour favoriser la gestion des émotions à l’adolescence

La régulation émotionnelle est une compétence qui se travaille et qui peut donc s’améliorer. Il est possible d’aider son adolescent·e à développer des stratégies de régulation émotionnelle efficaces. Les stratégies sont un outil clé qui permettent un meilleur bien-être psychologique et une meilleure satisfaction de vie chez les adolescent·e·s. En voici quelques-unes :

Donnez l’exemple!

Comme il a été mentionné un peu plus haut, l’observation joue un grand rôle dans le développement de stratégies saines de régulation émotionnelle. Il est donc important que les parents montrent l’exemple.

Favorisez l’expression des émotions.

Il est important que l’adolescent·e puisse mettre des mots sur ses émotions afin d’apprendre à les gérer. Encouragez-le·la à les exprimer sans jugement !

Créez un environnement chaleureux et sécurisant.

Cet environnement chaleureux a aussi de la structure et des limites claires. Il est important que les adolescent·e·s puissent trouver du réconfort et qu’ils n’aient pas peur de se confier sur leurs états internes. Il est également important que les interactions familiales soient calmes et contrôlées lorsqu’en présence de comportements mal adaptés (p. ex., violence, insultes). Ceci permet de poser des limites de ce qui est acceptable ou non, tout en utilisant des moyens de communication qui montrent à l’adolescent·e comment réagir de façon équilibrée.

Faites de la réévaluation cognitive.

La réévaluation cognitive est un outil qui permet de modifier le sens émotionnel attribué à certains évènements qui engendrent des émotions négatives. Elle permet en quelque sorte de créer un nouveau chemin de perception face à une situation. Ce faisant, elle peut réduire la détresse émotionnelle et mener à un plus grand bien-être psychologique. Effectivement, la réévaluation cognitive permet de prendre un peu de recul et de penser différemment la situation vécue et donc de diminuer l’importance attribuée à certains éléments perçus comme source d’émotions négatives. Par exemple, un·e adolescent·e pourrait voir l’échec comme une opportunité d’apprentissage et d’amélioration et donc vivre moins de détresse émotionnelle associée à l’échec.

Validez l’expérience émotionnelle de votre adolescent·e.

La validation de l’expérience émotionnelle dans un climat de non-jugement permet à l’adolescent de se sentir compris et accepté, ce qui peut aider à diminuer les émotions négatives vécues. Ceci permet de créer un environnement favorable à l’expression des émotions et indique à l’adolescent·e que de ressentir ces émotions est normal et compréhensible. Ceci permet également de favoriser le dialogue entre les parents et l’adolescent·e.

Sarah Kheloui

À propos de l’autrice

Sarah Kheloui complète un doctorat en psychologie expérimentale à l’Université d’Ottawa. Elle a complété son baccalauréat et sa maitrise à l’Université de Montréal. Ses travaux de recherche s’intéressent aux effets des contraceptifs oraux sur le microbiote intestinal, le cerveau et les habiletés cognitives lors de la puberté et l’âge adulte en utilisant des modèles animaux.

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